Transition écologique en Anthropocène : quelques réflexions sur l’économie de la sobriété.

Sylvie Ferrari

Abstract :
International audience
Aujourd’hui, la transition écologique remet au goût du jour l’idée de sobriété pour appréhender la régulation d’un grand nombre de limites planétaires. Dans les derniers travaux du GIEC (2022), la sobriété doit conduire à une réduction de la demande en énergie, en eau et en matières tout en garantissant le bien-être de tous. Dès lors que les usages actuels des ressources de la nature ne sont pas soutenables, que les limites planétaires ne sont pas respectées, l’habitabilité de la biosphère nest remise en cause (O’Neill 2018).La communication propose une réflexion sur les fondements d’une économie de la sobriété (Mongsawad, 2010) dont la finalité serait de permettre une nouvelle forme de prospérité basée sur le flux immatériel de la joie de vivre, flux indissociable de la production et de la consommation d’objets matériels (Georgescu-Roegen, 1971). Dans cette perspective, l’économie est comprise comme l’expression de notre relation matérielle aux autres (humains), et avec le reste du monde vivant (Hickel, 2020). Parce que l’économie a des fondements physiques et biologiques, nous formulons l’hypothèse que cette relation matérielle se traduit par des modes de consommation (des usages divers) avec des effets directs (au moment où la consommation a lieu) et indirects (au moment où les objets de consommation sont produits) dans tous les compartiments de la biosphère. Dès lors, en présence de limites planétaires, il convient de redéfinir la notion de consommation dans une perspective globale pour prendre en compte l’existence d’impacts environnementaux irréversibles. Ce contexte, qui remet en cause l’habitabilité de la biosphère pour le vivant et l’espèce humaine en particulier, nous invite à envisager la sobriété comme un levier pour réduire l’empreinte écologique des sociétés industrielles. Pour ce faire, il faut analyser comment il est possible de se détacher du confort lié aux flux d’objets matériels apportés par la société de consommation. Cette piste, explorée à l’aide de principes éthiques, permettra de préciser les contours d’un nouveau paradigme où l’abondance immatérielle associée aux interdépendances avec la Nature côtoiera la rareté matérielle et énergétique d’une Nature limitée (en termes de capacités, de possibilités de renouvellement et de restauration à l’échelle de l’humanité). A l’heure de l’Anthropocène, la finalité de l’économie de la sobriété doit garantir la permanence de l’habitabilité de la biosphère dans le temps. Par ailleurs, questionner la sobriété au niveau de la biosphère implique d’élargir le cadre d’analyse en l’ouvrant sur une justice globale où chacun doit pouvoir accéder à un niveau de consommation suffisant (Gosseries, 2011 ; Page, 2007). L’accès à ce niveau de consommation doit quant à lui permettre d’assurer un droit minimal à l’adaptation dans un monde fini. Un tel droit universel pourrait être décliné selon la formule « chacun doit avoir assez pour s’adapter », en rupture avec le principe selon lequel chacun devrait avoir la même chose.
Published : 2024-06-27
Document Type : Conference papers
Affiliation : Bordeaux sciences économiques (BSE) ; Université de Bordeaux (UB)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement (INRAE)
Source : hal-04633630

Citation

Sylvie Ferrari, « Transition écologique en Anthropocène : quelques réflexions sur l’économie de la sobriété. », NEC, 2024-06-27. URL : https://hal.science/hal-04633630