La Nouvelle Héloïse : « à la mesure de l’obstination du désir ». Étude stylistique de la lettre LIII
Frédéric Calas, Anne-Marie Garagnon
Résumé :
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Dans L’Œil vivant, auquel est empruntée la formule du titre (p. 163), Jean Starobinski écrit : « Tout porte à croire que l’approche du réel, chez Rousseau, n’est que la pointe avancée d’une poursuite imaginaire » et parle de « la lumière matinale de l’attente heureuse, de l’élan expansif » (p. 161). Dans la lettre LIII, Julie n’est que l’un des doubles de son créateur : toute à « l’euphorie primitive de l’élan vers un bientôt accueillant, la libre ouverture au possible, que ne vient pas troubler le souci d’une conformité aux lois mesquines de l’ici-bas », elle se fait rebelle à la loi du père comme aux mœurs et impératifs de la société bien-pensante. Un contretemps a déjoué l’espoir qu’avaient caressé les amants de s’entrevoir à Clarens, lors de la noce de la servante Fanchon, la frustration n’a fait qu’exacerber leurs sentiments, dynamique sentimentale et dynamique événementielle se nourrissant l’une l’autre. À nouvelle situation, nouveaux projets, dans un « effet de direct [qui] efface toute différence entre le discours narratif et l’univers représenté » (ibid., p. 89). Quant à la notion d’« obstacle », dont Jean Starobinski a magistralement démontré dans La transparence et l’obstacle le caractère obsédant chez Rousseau, elle est le « nœud » du passage, suscitant comme « péripétie » les mesures de contournement de l’interdit que prend une Julie stratège pour faire advenir la rencontre secrète avec Saint-Preux.
Date de publication : 2022-01-31
Citer ce document
Frédéric Calas, Anne-Marie Garagnon, « La Nouvelle Héloïse : « à la mesure de l’obstination du désir ». Étude stylistique de la lettre LIII », Loxias, 2022-01-31. URL : https://hal.science/hal-04309789