Entre éthique et médecine : la représentation du corps du mélancolique
Résumé :
International audience
It has been noticed that Arabic medieval medicine was mostly mastered by doctors who were also philosophers, and in particular authors of ethical treatises. It is the case for Râzî, Avicenna, and Maïmonides for example. Ethics and medicine were considered to be two comprehensive and complementary arts of life. In the same way that medicine aims at curing the body, ethics is considered to be a medicine for the soul, by teaching principles allowing men to reach happiness thanks to a therapy of desire. But the relationship between ethics and medecine goes beyond this parallelism. The main principle of medical theory, that is the reciprocity between mind and body, implies that what is good for the body should be good for the soul, and conversely. But the body of the melancholics sets a problem for the doctor-philosopher : it shows that the way that ethics advises to deal with the body is not always successfull, and it brings medicine and ethics into opposition. Futhermore, it sheds light on the fact that ethics, when it is considered as a medicine is torn apart by two tendencies : on one side, it advises to depart from mondane realities; and one the other side, it aims at being a comprehensive pratice of the self grounded on an empirical rule.
La médecine arabe médiévale revêt la particularité d’avoir été, pour sa plus grande partie, écrite par des philosophes, auteurs entre autres de traités d’éthique. C’est le cas de Râzî, Avicenne, ou encore Maïmonide. Éthique et médecine se présentent en effet comme deux arts de vie complets et complémentaires : la médecine apparaît comme un modèle pour l’éthique, qui se voit comme une médecine de l’âme, et inversement, l’éthique entend livrer des principes pratiques menant l’homme au bonheur grâce à une thérapie du désir. Mais les rapports entre médecine et éthique vont au-delà du parallélisme. Le principe fondamental de la médecine arabe, la réciprocité entre l’âme et le corps, signifie que ce qui est bon pour l’âme devrait l’être aussi pour le corps, et inversement. Or, le corps du mélancolique, maladie de l’âme et du corps, pose au philosophe-médecin un réel problème : il met en échec la manière dont l’éthique conseille de disposer le corps, et dresse en opposition médecine et éthique. Il met ainsi en lumière le fait que l’éthique considérée sur le modèle de la médecine est tiraillée entre le détachement des choses mondaines d’une part, et l’idée d’une pratique complète du soi apte à construire une norme empirique d’autre part.
Date de publication : 2008-10-09
Citer ce document
Pauline Koetschet, « Entre éthique et médecine : la représentation du corps du mélancolique », Corps et savoir, 2008-10-09. URL : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03441107