“Miles and miles and miles of painted darkness”: Peter Greenaway and the intelligibility of representation
Résumé :
Peter Greenaway pratique la philosophie naturelle, au sens où on l'entendait au XVIIème siècle. Dans cet article, je m'efforcerai d'étudier les relations entre le savoir et la représentation du monde au sein de quelques-unes des productions de Greenaway. Constatant par exemple que beaucoup des personnages de ses fictions cinématographiques prétendent pouvoir traiter la représentation d'une manière soi-disant "originale", et pensent être en mesure d'établir une correspondance isomorphique entre le monde et sa représentation, je m'interrogerai sur les conditions de production de la représentation, et sur la question centrale de l'objectivité. Afin de rendre le monde intelligible, il semble que la représentation s'impose – la question est de savoir si l'essence du monde peut être capturée par le biais d'un travail qui implique nécessairement une déformation et une retranscription. Nous sommes ici au cœur d'un vaste territoire, qui est celui que les arts visuels et textuels ont façonné au fil des siècles. Francis Bacon écrivait dans le Novum Organum (1620) que "l'entendement humain est enclin de par sa nature même à supposer l'existence de beaucoup plus d'ordre et de régularité qu'il ne s'en trouve réellement dans le monde. Et, bien qu'il existe de nombreuses choses dans la Nature qui demeurent singulières et impossibles à concevoir, l'entendement ne cesse de tracer des parallèles, des correspondances et des parentés qui n'existent pas."1 Les singularités et les différences ont ainsi coutume de s'effacer avant de laisser la place aux similarités et à l'harmonie: ce désir constant de l'homme de voir l'ordre et la régularité dans le monde est mis en scène par Greenaway de manière magistrale au sein de ses productions.
Peter Greenaway is a born natural philosopher (in the XVIIth century sense). In this article, I will strive to define the close relationship between knowledge and the representation of the world, as it is presented in some of Greenaway’s works. Observing that indeed many characters of his cinematographic fictions profess to be able to deal with representation in a way that is presented as "original" and believed to allow a valid correspondence between the world and the represented, I will wonder about the conditions of production of some representations, questioning the very possibility of unbiased representation. To make the world intelligible, it seems that representation is a necessary step – the question is to know whether the essence of the world can ever be captured through the reworking of some of its physical characteristics or not – we are here in a territory as vast as can be, and this territory happens to correspond inch by inch to that which visual and textual arts have trodden for centuries. Francis Bacon wrote in Novum Organum (1620) that "the human understanding is of its own nature prone to suppose the existence of more order and regularity in the world than it finds. And though there be many things in nature which are singular and unmatched, yet it devises for them parallels and conjugates and relatives which do not exist."2 Singularities and differences are usually erased in order to be perceived as similarities and harmony: this constant and delusive desire of man for order and regularity is what Peter Greenaway remodels for us.
Date de publication : 2012-01-16
Citer ce document
Lawrence Gasquet, « “Miles and miles and miles of painted darkness”: Peter Greenaway and the intelligibility of representation », Cycnos, 2012-01-16. URL : http://epi-revel.univ-cotedazur.fr/publication/item/256